de Christian Bobin

Court roman d’une centaine de pages pour 12 chapitres, « Le Très-bas » a obtenu le Grand Prix catholique de littérature un an après sa publication en 1992.

Il ne s’agit pas de la biographie de François d’Assise (1182-1226), fondateur de l’ordre des frères mineurs (=franciscains) et canonisé en 1228, car, comme dit l’auteur, on sait peu de choses sur lui. C’est plutôt le récit possible de sa vie.

Pourquoi le titre « Le Très-Bas » ? C’est ainsi que Christian Bobin considère Dieu… à la différence du dominicain Jacques de Voragine qui, 40 ans après la mort du saint, appelait François « le serviteur et l’ami du Très-Haut » … car, selon notre romancier contemporain, « c’est oublier cette impatience du Christ écartant les apôtres raisonneurs pour faire place aux enfants. C’est oublier que rien ne peut être connu du Très-Haut sinon par le Très-Bas, par ce Dieu à hauteur d’enfance. »

Le roman commence par une phrase déconcertante : « l’enfant partit avec l’ange et le chien suivit derrière. » (du Livre de Tobie 6,1). Et le romancier de s’attarder sur l’image du chien, vu comme « vagabond, folâtre »… Plus loin dans le roman l’auteur évoque l’attitude de l’ânesse plus clairvoyante que son maître, le devin Balaam (Nb 22,22-23) qui lui fait comprendre que Dieu veut lui parler.

L’auteur imagine le rapport étroit entre saint François et la nature : « Il n’a jamais rien vécu qui ne soit en accord parfait avec cette croyance en une égalité absolue de chaque vivant avec tous les autres, en la même dignité d’existence donnée à chacun – gueux, bourgeois, arbre ou pierre – par le seul miracle d’apparaître sur terre, baigné du même soleil d’amour souverain. »

Christian Bobin exprime dans le roman l’idée toute personnelle de la sainteté : « D’ailleurs il n’y a pas de saint. Il n’y a que de la sainteté. La sainteté, c’est la joie. Elle est le fond de tout. Dire de quelqu’un qu’il est saint, c’est simplement dire qu’il s’est révélé, par sa vie, un merveilleux conducteur de joie. »

C’est de manière très poétique que les différents moments de la vie de François nous sont relatés : sa jeunesse et son adolescence insouciantes, ses rêves de chevalerie et de gloire … et comme un appel qui se produit à Spolète, une métamorphose : « Je ne veux plus rien que la vie nue et fraternelle », dit le héros. S’ensuit la création de l’Ordre, la parfaite entente avec Claire, la fin de vie avec ce chant de louange « Loué sois-tu, Seigneur… ! »

Vous aurez compris qu’une des raisons pour lesquelles j’aime ce livre est son écriture poétique avec un souffle spirituel du début jusqu’à la fin : « La beauté vient de l’amour comme le jour vient du soleil. Comme le soleil vient de Dieu. »

A cause de ses multiples allusions à la Création, l’auteur souligne qu’il y a dans la Bible « beaucoup d’étoiles, d’oliviers et de fontaines, de petits ânes et de figuiers, de champs de blé et de poissons -et le vent, partout le vent. »

J’ai découvert cette œuvre littéraire grâce au spectacle « Le Très Bas ou le choix de saint François d’Assise » en guise de point d’orgue au chantier diocésain de l’écologie à Bordeaux en 2011. Une comédienne parisienne, Suzanne Plagne, récitait le beau texte de Bobin qui parle tant au cœur qu’à l’esprit … et le passage qui m’avait bouleversée et donné envie de lire le roman était celui où François va dans la léproserie d’Assise pour « contempler les fantômes et les serrer contre soi, longtemps, en silence. Il sort de là la fièvre au cœur, le rouge aux joues. Ou plutôt il n’en sortira plus. Il a trouvé la maison de son maître. Il sait maintenant où loge le Très-Bas : au ras de la lumière du siècle, là où la vie manque de tout… » 

Quel magnifique hommage à saint François d’Assise, la description si poétique de son cheminement intérieur qui l’a conduit au dépouillement et à l’amour de toutes les créatures, au don de soi et à la vraie joie !

Un livre proposé par Marie-Laure de l’équipe diocésaine à l’écologie intégrale

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