Cette entrée en semaine sainte, ranime pour moi une session vécue il y a quinze jours à Lourdes : les évêques de France, comme promis, tenaient à faire un point d’étape sur la lutte contre les violences sexuelles dans l’Église catholique. Une grande assemblée était invitée pendant un jour et demi : personnes victimes, seules ou en collectifs, experts, responsables associatifs, et des invités de chaque diocèse, laïcs, prêtres et diacres, religieux et religieuses.

 A la demande de notre père évêque, le père Michel Malvezin et moi-même étions présents. Loin de vouloir vous faire un compte-rendu, j’aimerais vous partager trois « flashs » qui, à mon sens, éclairent ce que nous nous apprêtons à vivre en Eglise cette semaine.

Tout d’abord une photo devenue emblématique de la souffrance de toutes les victimes de violences sexuelles dans l’Eglise : cet enfant pleure silencieusement, muré dans une souffrance indicible, et avec lui, c’est le Christ qui souffre. Il porte la croix de cet enfant, trop lourde insensée pour ce petit innocent condamné… mais plus terrible encore est la souffrance de notre Seigneur de voir que l’Eglise qu’il a voulue pour donner la vie de Dieu, peut, par certaines personnes en son sein, donner la mort ; mort physique, psychique, relationnelle, sociale et spirituelle. Cette photo était sous nos yeux dans ce grand amphi de la cité Saint-Pierre pour nous rappeler cette blessure qui ne peut se refermer.

Pendant les temps de prière, nous avions aussi face à nous une reproduction du Christ de Georges Rouault. Cri de douleur du Christ blessé, vivant pleinement dans sa chair, son âme, son esprit, le scandale du mal. Mais aussi seule présence possible au cœur des pires souffrances assumées par notre Dieu tendre et miséricordieux. « Il s’est abaissé devenant obéissant jusqu’à la mort et le mort de la croix. » Ph 2,8. Le visage du Christ de Rouault semblait être tourné vers celui de l’enfant qui pleure, mais aussi vers chacun de nous en assemblée à Lourdes : lors de la liturgie des Rameaux, la Parole de Dieu nous interroge personnellement sur notre Foi en Jésus. Être disciple de Jésus ressuscité suppose de le contempler, de le suivre dans sa Passion et sa mort. C’est avec ses stigmates qu’il apparaît !

Dans cette « crise des abus », on pourrait être tenté de tourner la page, or la question va bien au-delà, car il serait simple pour l’Eglise de vouloir camoufler les stigmates, alors qu’il s’agit d’accepter d’être faible, défaillante, humiliée, pour davantage se convertir au Christ : vivre une dynamique Pascale.

Lors de la messe du lundi 31 mars, l’église était constituée d’une assemblée peu commune, attirée par la grande croix au centre : la travée centrale exclusivement violette avec la centaine d’évêques, entourée de chaque côté par des couleurs plus variées avec les prêtres, diacres, religieux, laïcs… Le mot « compagnonnage » est souvent revenu pendant cette session, et de fait, la conférence des évêques de France a souhaité se positionner comme étant côte à côte avec nous tous, écoutant et dialoguant pour que nous avancions ensemble. L’impression qui me reste est celle d’une Eglise pauvre, humble et vraie, prête à parcourir cette année le chemin de croix pour qu’il soit chemin de vie.

Marguerite Brunet, coordinatrice diocésaine de la pastorale des jeunes et déléguée à la prévention et à la lutte contre les abus

Facebook
Email
WhatsApp
Twitter

Actualités